Tu viens de recevoir un diagnostic d’ITSS ? Très probablement que ça ne faisait pas partie de tes projets à court, moyen ou long terme ! Il est très rare qu’on planifie de contracter une gonorrhée entre l’épicerie et payer la facture d’hydro. Ceci étant dit, on n’a pas le choix d’accepter le diagnostic et de passer aux étapes suivantes. Parmi ces dernières, il y a le traitement, si possible, et le dévoilement à notre/nos partenaire·s.

L’acceptation en soi d’un diagnostic peut grandement varier selon le type d’ITSS contractée. Comme on t’en parlait ici, il existe les ITSS bactériennes et infectieuses. S’il existe un traitement antibiotique de 7 jours pour une chlamydia et qu’on peut tourner la page par la suite, c’est différent que de devoir vivre avec le VIH toute notre vie — même si la situation des personnes séropositives s’est nettement améliorée ! C’est bien normal de devoir prendre quelques minutes, heures ou jours afin de digérer la nouvelle, caresser notre chat et écouter Grey’s Anatomy pour une 6e fois.

Cependant, le dévoilement à tan ou tes partenaires est une étape importante, voire primordiale. Pourquoi ? 

  • Parce que le dévoilement d’une ITSS réduit considérablement le risque de propagation. C’est un cercle : plus les personnes se font dépister, plus elles dévoilent leur ITSS à leurs partenaires, moins les risques sont élevés de contracter une ITSS lors d’une prochaine relation sexuelle ; 
  • Si vous avez des relations sexuelles sans protection, les chances sont élevées que tes partenaires aient contracté la même ITSS que toi ; 
  • Tout le monde mérite d’être accompagné respectueusement et adéquatement durant cette épreuve. 

Ce que dit la loi 

Le concept de MADO te dit quelque chose ? Eh non, ce n’est pas le Cabaret à Montréal où tout le monde passe des soirées de rêves, entouré de perruques et d’ongles de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. C’est plutôt les maladies (intoxications ou infections) à déclaration obligatoire. Ces dernières doivent être diagnostiquées par un·e médecin ou encore confirmées par un laboratoire, qui en fera ensuite la déclaration à la santé publique — c’est obligatoire. L’objectif de cette déclaration est de permettre aux autorités de garder un œil sur la santé de la population. Voici en quelques points pourquoi les MADO existent :

  • Elles représentent un risque de contagion au sein de la population ; 
  • Elles sont médicalement reconnues comme étant une menace pouvant entraîner des problèmes de santé importants ; 
  • Elles peuvent nécessiter une vigilance des autorités de santé publique ou la tenue d’une enquête si la propagation devient trop importante.

À titre d’exemple, les hépatites B et C, la chlamydia trachomatis, la syphilis, ainsi que le VIH (seulement si la personne a reçu ou donné du sang ou des tissus) sont toutes des ITSS à déclaration obligatoire. 

Lorsqu’une MADO est diagnostiquée, la personne atteinte est fortement encouragée à en informer ses partenaires et un plan de match est généralement établi avec le·a professionnel·le de la santé, à savoir comment procéder pour les aviser.

Le VIH est un cas particulier : il comprend certaines particularités quant à l'obligation légale d'une personne à informer un·e partenaire de son diagnostic avant d'avoir des relations sexuelles. On t'invite à en prendre connaissance ici.

Comment faire le dévoilement d’une ITSS à un·e partenaire

Que ton diagnostic fasse partie des MADOs ou non, c’est toujours une bonne idée d’informer les personnes que tu pourrais avoir mises (ou mettre) à risque. On te propose donc quelques conseils pour dévoiler ton ITSS à tan ou tes partenaires. Sache, en premier lieu, qu’il n’y a pas de méthode ou de procédure à suivre à la lettre ou obligatoire. Le principe est de se respecter et d’y aller comme on le sent. Cependant, si tu comptes payer ta mère pour qu’elle le fasse à ta place ou acheter une pancarte pour l’accrocher derrière un avion en plein vol, voici quelques trucs et astuces peut-être plus appropriés pouvant t’aider :

1. Informe-toi

Avant toute chose, informe-toi sur l’ITSS en question. Lis sur les sites d’informations fiables (organismes communautaires, INSPQ, gouvernement du Québec, etc.), parles-en à un·e professionnel·le de la santé, consulte des dépliants ou livrets informatifs. Bref, apprends les éléments les plus importants concernant l’infection : le traitement possible, les signes et symptômes, le risque de contagion, le mode de transmission, la période d’incubation, les conséquences possibles, etc. 

Il est pertinent de s’informer pour que tu sois pleinement conscient·e de ce qui se passe dans ton corps et aussi pour répondre, dans la mesure du possible, aux questionnements que tan partenaire risque d’avoir au moment de lui dévoiler. Si les informations que tu trouves ne sont pas claires ou difficiles à comprendre, assure-toi de connaître les ressources pouvant t’éclairer sur le sujet, comme l’infirmier·ère au CLSC le plus proche de chez toi, par exemple.

2. Identifie les partenaires à informer

Il est important de savoir que la période d’incubation d’une ITSS est de minimum 2 semaines. Si tu as eu un comportement sexuel à risque (non protégé, par exemple), il est donc important d’attendre 2 semaines avant de faire un test de dépistage.

Lors d’un résultat positif à une ITSS, il faut contacter toutes les personnes avec qui tu as eu des relations sexuelles entre la contraction de l’infection et le résultat positif. Pour la chlamydia, par exemple, si tu as fait ton prélèvement et que tu as eu un résultat positif, tu dois aviser toustes tes partenaires dans les deux derniers mois. Si tu as eu plusieurs partenaires, il n’y a aucune honte à avoir. L’important, c’est que chacun·e soit contacté·e individuellement (évite idéalement les conversations de groupe sur Messenger, you know). Il est aussi utile de savoir que ton infirmier·ère peut t’aider dans le contact avec tes partenaires. Si tu souhaites que le tout demeure confidentiel, il est possible de lui en parler et d’évaluer les options. 

3. Évite les relations sexuelles non protégées après un résultat positif

Cela va de soi, mais il est tout de même important de se le rappeler. Si tu viens d’avoir un résultat positif à une ITSS, ce n’est pas le temps de reconquérir ton ancienne fréquentation et de lui faire découvrir tes nouveaux talents au lit sans protection. Tu ne dois en aucun cas avoir une relation sexuelle non protégée avec une personne sans que cette dernière soit au courant. Si tu souhaites prendre quelques jours pour digérer la nouvelle, il n’y a aucun problème. Cependant, considère que le risque de contagion sera présent, même avec une protection. Utilise donc ton jugement. Comme dirait ma mère : you do you, mais you don’t do anybody else. (Elle ne dit pas ça, non.)

4. Choisis le bon moment

Maintenant que tu t’es informé·e et que tu as identifié tan ou tes partenaires à qui tu dois dévoiler ton ITSS, il est temps de prendre le taureau par les cornes, tenir le loup par les oreilles et le chat par la queue… et l’annoncer. 

Choisir le bon moment et le lieu aide à faire en sorte que tan partenaire soit pleinement disposé·e à t’écouter et discuter. Tu peux faire ça dans un endroit public si tu crains la réaction de l’autre personne. Cependant, l’intimité est moindrement là si tu es capable de sentir le parfum de la personne à la table d’à côté. Idéalement, choisis un lieu calme et intime pour pouvoir discuter de ce sujet délicat et prendre le temps de le faire, sans les oreilles indiscrètes de Karen à l’heure du lunch.

Gif d'une personne qui écoute la conversation de deux autres personnes dans un restaurant.

Si tu choisis de le faire par téléphone ou message texte, tu peux demander à la personne si elle est disponible pour discuter quelques minutes et, ainsi, t’assurer d’avoir le temps et l’opportunité de lui donner toutes les informations nécessaires.

5. Communique bien

Inutile de se voiler la face, lorsqu’on doit discuter d’un sujet délicat, le stress et l’anxiété peuvent prendre le dessus. Le ton de voix est rapide, mélangeant et on a de la difficulté à formuler des idées claires. Afin d’éviter cette situation le plus possible, fais-toi une liste d’éléments dont tu veux discuter avec l’autre personne. Pourquoi ? Parce que ça te permet d’avoir un aide-mémoire pour ne rien oublier, et ça peut être utile pour mieux formuler tes idées. Quelques éléments à communiquer pourraient être, par exemple : 

  • Le type d’ITSS ; 
  • Traitement possible, ou non, ainsi que la durée du traitement s’il en a un ; 
  • Où aller se procurer le traitement ou l’aide possibles (CLSC, clinique de dépistage scolaire ou à l’hôpital, pharmacie)*

*Il est important de savoir que tous les CLSC offrent des services de dépistage. Cependant, ce service est offert pour les personnes ASYMPTOMATIQUES (elles n’ont pas de symptômes). Si tu as des signes (ex. : des écoulements, des rougeurs, des irritations, des sensations de brûlure, etc.), le personnel infirmier te suggérera d’aller à l’hôpital pour consulter un·e médecin. 

Aussi, des phrases qui décrivent comment tu sens peuvent t’aider, comme : 

  • J’ai quelque chose à te dire, mais j’ai peur de ta réaction ; 
  • Je dois discuter de quelque chose avec toi et ça me rend nerveux·se ; 
  • J’aimerais te parler de quelque chose, et j’aimerais que tu me laisses terminer avant de dire quoi que ce soit. 

6. Tiens compte des émotions de l’autre personne

Finalement, lors de la discussion, il est important de se préparer aux différentes réactions de l’autre personne. Cette dernière peut bien réagir, poser des questions et être compréhensive. C’est tout aussi possible qu’elle soit en colère et accusatrice. Il est important de garder en tête que toutes les émotions pouvant traverser la tête de la personne sont normales, pourvu qu’elle reste respectueuse envers toi. Ce sera probablement un choc pour elle (comme ce l’a peut-être été pour toi) et elle pourrait être inquiète ou anxieuse par rapport à la situation. Le fait de t’être informé·e au préalable et d’avoir certaines informations pourra l’aider dans son insécurité.

N’oublie pas : toutes les choses se disent, c’est la manière de le dire qui est à considérer. Tu peux aussi lui partager la publication ci-bas, et en prendre connaissance toi-même : les ITSS baignent dans toutes sortes de stigmas, mais on tient à te dire que d’en avoir une, ce n’est pas la fin du monde. Ta vie sexuelle n’est pas finie (si tu souhaites toujours en avoir une !) ❤️‍🩹.

Maintenant, tu es fin prêt·e à dévoiler ton ITSS aux personnes concernées. Reste toi-même et, surtout, sois indulgent·e envers toi. Ce n’est pas une situation facile. Entoure-toi de personnes de confiance et n’hésite pas à faire appel aux ressources près de toi pour t’informer ou te soutenir dans le processus !

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À propos de Sophie Bouchard

Travailleuse sociale en formation et rédactrice pigiste | Pronoms : elle/la | 2 vérités, 1 mensonge : fan de blagues trop poussées, snake lover et sportive quelques heures par semaine. J’étudie à la maîtrise en travail social après un bac en psychologie, je suis travailleuse de rue et enseignante de psycho au Cégep (et oui, un peu essoufflée !) Je découvre depuis quelques années le féminisme intersectionnel dans mon domaine et la beauté d’une sexualité sans tabous. Comme dirait ma mère : quand il y a de la gêne, il n’y a pas de plaisir ! J’aimerais discuter avec toi, au fil des articles, de sujets sociaux quelque peu oubliés, mais ô combien importants. Enchantée !

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