Plus on vieillit, plus on comprend que le changement est inévitable, même souhaitable. Nos goûts changent, se confirment ou s’infirment. On se fait plus confiance, également. L’évolution de la perception de notre propre sexualité est parfois un sujet sensible. Celle-ci est constamment en transformation, et avec raison : on n’est pas la même personne sexuellement à 30, même 40 ou 50 ans que lors de nos premiers émois.  

Un des aspects les plus difficiles par rapport à avancer, c’est de rester en contact avec son corps, de continuer de peaufiner ses envies, de découvrir et confirmer ce qu’on aime (et qui, et comment) et ce qui ne nous attire plus. Pour avancer et se comprendre, on doit également apprendre à déconstruire ses propres tabous et ses scripts, ce qui peut être un travail de longue haleine. Le fait est que notre sexualité est en mutation continuelle et c’est une expérience intéressante de repenser aux différentes saisons de notre vie, aux hauts et aux bas qui nous ont définis en tant que personne et donc qui ont aidé à former notre sexualité.

L’éveil du corps

On parle souvent de nos premières années d’activités sexuelles comme de notre période de découverte. Et en quelque sorte, ça l’est. Par contre, ce qu’on oublie parfois, c’est que la découverte de soi est continue et interminable. Durant ces premières années d’exploration, on est souvent très influencé·e par l’environnement dans lequel on baigne, les messages de société que l’on reçoit, celui que nous renvoient nos partenaires et nos ami·e·s. 

On ne va pas se mentir, c’est exigeant et ardu, quand on est jeune et naïf·ve, de s’écouter amplement, résolument. Ces premières années d’expérimentation de notre sexualité sont donc les années de fébrilité, de découverte, oui, mais aussi d’abandon à l’autre, ces années où souvent on se satisfait de satisfaire l’autre. Ces années où on jette les pierres de notre fondation que nous venons souvent à détruire et reconstruire, en vieillissant. Ce serait le moment de poser des bases solides, mais comme tout ce que l’on apprend, c’est parfois juste en se rendant compte que la tour est penchée qu’on réalise qu’on a mal commencé.

Je reviens à la pression des autres, parce que celle-ci forme une présence charnière dans nos vies d’adolescent·e·s et jeunes adultes. C’est une pression immense, celle de plaire aux autres, de les combler. Surtout en tant que femme. Personnellement, j’ai déménagé quand j’avais 16 ans aux États-Unis et ceci a grandement affecté la personne que je suis devenue, surtout en ce qui concerne ma relation avec les hommes. Dès mes premiers ébats, j’ai intégré la notion que mon rôle en tant que femme était de plaire à l’homme, que son désir avait primauté sur le mien, que je devais donc trouver des moyens d’assouvir mon plaisir tout en en retirant du sien. C’est une conception de la sexualité que je suis encore en train de déconstruire aujourd’hui. Ceci est un exemple peut-être un peu draconien, mais la réalité est que c’est l’expérience de plusieurs jeunes personnes : pour comprendre sa sexualité, son désir et ses plaisirs, il faut d’abord avoir la confiance de s’écouter et un environnement propice à cette écoute.

Construire c’est déconstruire

Je parlais de la tour bâtie toute croche, plus tôt. L’image est peut-être un peu laborieuse, mais on comprend l’essentiel : souvent, en vieillissant, on sacre tout à terre et on recommence.

Bien sûr, je n’insinue pas que tout ce qu’on apprend dans nos premières années de sexualité est à jeter aux poubelles. Ces années sont essentielles à la construction de ce qu’on est, à la compréhension de ce qu’on aime et — souvent, surtout — de ce qu’on n’aime pas. Apprendre est un processus qui se fait par élimination : pour mieux se comprendre, il faut essayer.

De plus, certain·e·s ont des souvenirs magnifiques et marquants de relations stables et saines, empreintes de respect et d’écoute. Par contre, force est d’admettre que cette période de découverte vient souvent avec beaucoup d’essais-erreurs. Puis, on apprend, on se pose, on change. Et tout ce qu’on a intégré comme la réalité devient questionnable, changeant. C’est confrontant, questionner ce qu’on connaît, accepter que peut-être que ce que nous avions intégré comme la règle n’est en fait qu’une option parmi tant d’autres.

S’aimer et s’écouter

J’ai toujours craint un peu de vieillir. Je trouvais qu’il y avait quelque chose d’apeurant dans l’idée d’un corps qui change, d’un désir et d’une sexualité qui changent aussi. Selon les réalités de la vie, c’est vrai que celui-ci est appelé à changer : métro, boulot, dodo, famille, etc. Vieillir nous confronte à de nouveaux obstacles, certes, et c’est souvent ce qu’on aborde le plus, quand on parle de couples qui vieillissent ensemble. Ce sont aussi des enjeux complètement légitimes.

Par contre, je trouve qu’on ne parle pas assez de la beauté d’atteindre un moment de nos vies où on a exploré, on a tenté des trucs, on s’est ouvert·e, à soi-même et aux autres. C’est magnifique d’arriver à un âge où on se connaît si bien qu’on sait quoi demander, quoi faire. On se respecte également, on a une confiance que seul le temps peut nous conférer. Et on apprend encore, on se renouvelle, malgré le temps qui passe et les années de relation (avec soi ou d’autres). C’est un privilège de connaître son corps et celui de l’autre comme le fond de sa poche.

Évolution continuelle

Je souhaite à tout le monde, de tous âges, de prendre souvent le pouls de leur sexualité. On n’est jamais trop jeune pour se demander ce qu’on aime, on n’est jamais trop vieux/vieille pour découvrir autre chose. La sexualité, lorsqu’elle est saine, est un des aspects les plus grandioses de nos vies, un moment où on connecte avec soi-même et autrui. C’est beau, au fond, de prendre le temps de regarder le chemin accompli. 

Pour ce faire, il existe une tonne de questions à se poser. On t’invite d’ailleurs à faire cet exercice d’introspection avec nous :

  • Comment s’est passé l’éveil de ton corps ?
  • Qu’est-ce que tu apprécies le plus de ta sexualité ? Qu’est-ce que tu aimerais oser changer (s’il y a lieu) ?
  • Quel a été un apprentissage important pour toi au sujet de ta sexualité ?

C’est une bonne façon de commencer à travailler sur le fait d’être en contact avec soi-même et ses besoins en termes de sexualité.

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À propos de Marie-Christine Chartier

Rédactrice pigiste | Pronoms: elle/la | Autrice de romans de fiction, rédactrice pour différentes plateformes, bébé humoriste, bref, ma journée en est une réussie si j’ai écrit quelque chose. J’ai eu plusieurs vies : athlète, étudiante et chercheuse et maintenant autrice/artiste. Ma curiosité et mon amour des gens et des relations humaines sont le moteur derrière mes réflexions. C’est d’ailleurs ce qui m’a menée ici pour parler de sexualité, d’amour, de passion, de désir, de plaisir, et de tout ce que ce mélange implique.

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