Te rappelles-tu ta première fois ? Le contexte, la personne, les émotions qui t’ont submergé·e…
D’une personne à l’autre, les souvenirs varient, étant parfois roses, parfois moins. Toutes les histoires sont différentes et valides. Certaines nous ouvrent les yeux, d’autres nous donnent espoir et d’autres encore sont source de réconfort et nous font sentir moins seul·e.
Si la plupart des gens accordent une certaine importance à ce passage de vie (comme on t’en parlait ici), pour les personnes queers, l’expérience d’une première fois sexuelle non-hétéro peut être encore plus complexe et significative, baignant dans la découverte (et peut-être même l’affirmation) de soi et la confrontation de normes sociétales parfois rigides.
À travers les quatre témoignages suivants, on te propose un doux aperçu des émotions, des défis et des joies que peut engendrer une première expérience sexuelle quand on fait partie de la communauté 2ELGBTQIA+.
Déshabiller le désir
Elle s’appelait MK, c’était l’été de mes quinze ans. Je l’avais rencontrée sur Facebook à cette époque où on osait faire des demandes d’ami·e à des gens qu’on ne connaissait pas du tout simplement parce qu’ils semblaient vivre à peu près dans la même région. Une petite communauté de lesbiennes aux marges de laquelle j’avais hâte de m’aventurer, même si mon identité-sans-les-mots d’ado non binaire trans et queer n’y fitait que de biais. J’y trouvais la masculinité qui m’appelait et me réconfortait, et je m’arrangeais tant bien que mal de cette alliance qui était la seule disponible dans mon monde restreint.
J’aimais le langage de Québécoise de région cru et direct à outrance à MK, ses piercings et son grand sourire qui utilisait des mots comme « chix » et « beauté ». Je ne me souviens plus trop bien de nos premières rencontres, tellement c’est déjà loin. Mais cette fois où on a baisé après avoir passé une journée à La Ronde à se sentir vraiment gai·e·s dans nos looks alternatifs de 2010, j’en garde des images en flashs assez vifs.
On était rentré·e·s chez elle complètement à l’autre bout de la ville par rapport à ma maison de l’Ouest, dans un monde tellement différent du mien. On s’était dépêché·e·s d’aller se frencher dans sa toute petite chambre sombre au milieu de l’appart. Elle l’avait déjà fait avec des filles, moi avec deux gars. Je m’étais trouvé·e ridicule de porter un tout petit string blanc sous mes skinnies que je la revois m’enlever avec difficulté, comme c’était impossible de ne pas s’empêtrer dans ces trucs-là. Elle gardait ses pants parce qu’elle était dans sa semaine, et je me retrouvais sur le dos sur son matelas par terre, je crois. Elle s’affairait à me toucher et la situation semblait un peu banale et absurde—j’ai compris bien plus tard que j’étais mal à l’aise en position de bottom avec qui que ce soit, mais encore plus avec des filles. Mais c’était fait, je pouvais dire que je l’avais fait… genre. Je ne me souviens plus de ce qui est venu ensuite, mais ce n’était pas moi.
Je manquais d’occasions après ça, jusqu’au cégep. Je partage plus souvent cette fois suivante comme ma première, puisque celle-là, je l’ai vécue avec une véritable excitation. On avait opté pour la douche pour éviter d’éventuels dégâts. L’eau ne couvrait pas nos halètements qui se mêlaient au son de nos paumes, et là, j’ai vraiment senti l’intensité de nos corps qui se voulaient, se heurtaient et se passionnaient. Ça, c’était ce que je rêvais de vivre. C’est la première fois qui retentit dans mes souvenirs et qui me surprend et m’éprend. Je la réclame.
– Anonyme
Février 2010, dans le sud de la France
J’ai 17 ans, et je commence à peine à assumer mon homosexualité dans une région rurale, où les mentalités sont étriquées. Je me sens seul et je pense clairement être la seule personne queer de ma ville, de ma région même. Je me suis inscrit sur un forum de discussion pour jeunes personnes queer et je lis tous les sujets possibles. C’est ma bulle à moi.
Assez vite, je discute avec un homme plus âgé vivant tout proche. Il a une trentaine d’années, l’écart d’âge est assez conséquent, mais je me dis : « Wow, c’est génial, je ne suis pas seul au final » !
Nous avons prévu de nous rencontrer et de coucher ensemble, tout est clair. Il me donne son adresse et contre toute attente, je me rends compte qu’il est un de mes voisins.
Jour-J :
Je suis fébrile, stressé, mais également excité à l’idée de « perdre ma virginité ». C’est comme une évidence pour moi, et cet acte, comme un rite de passage, va faire de moi une personne adulte. J’arrive devant chez lui, je fais les cent pas avant d’entrer, car le stress et la peur s’emparent de moi. Sans réfléchir, j’appuie sur la sonnette. Il m’ouvre la porte et m’invite à boire un verre d’eau. Les choses deviennent ensuite très vite enflammées et la peur disparaît pour laisser place au désir, au plaisir, et à une énergie puissante révélant une facette de moi que je ne connais pas, plus instinctive. Nos langues parcourent les courbes de nos corps, les bosses, les creux, certaines zones érogènes, nos sexes et ailleurs. Ensuite, il me pénètre avec douceur, prenant le temps de savoir si je vais bien. Nos deux corps unis bougent sur le même rythme. Une certaine liberté s’empare de moi, et je perds le contrôle. Je n’ai qu’une envie, amener mon corps et le sien vers la jouissance.
Une fois notre but atteint, les hormones en chute libre me ramènent à la réalité. La personne timide que je suis refait surface. Nous nous sommes dit au revoir et avons continué cette relation secrète pendant presque une année.
Après réflexion, cette première fois fut un moment agréable, m’ouvrant les portes sur mon identité propre et faisant de moi l’être multiple que je suis désormais.
– Jean-Baptiste Pappalardo
« C’est OK si on ne va pas jusqu’au bout ? »
C’est ce que ma partenaire m’a demandé lors de notre première fois. Je me pose alors la question : c’est quoi aller jusqu’au bout ? Qu’est-ce qui « compte » dans une relation sexuelle queer où la sacro-sainte pénétration pénis-dans-le-vagin n’est pas une possibilité (ni une nécessité) ?
Dans mon cas, ma première fois avec une femme s’est vécue tout en douceur. Nous avions passé la journée à profiter de la nature au bord d’un petit cours d’eau et la soirée à nous embrasser et à ne plus pouvoir nous détacher l’une de l’autre.
J’étais à la fois très excitée et terrorisée. Je ressentais un immense désir pour elle, mais j’avais peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas connaître les bons gestes ou les mots à lui chuchoter. C’est drôle, j’étais une femme depuis déjà 29 ans à l’époque et j’avais peur de ne pas savoir explorer un autre corps féminin. La belle ironie !
Entre deux baisers, pendant que nos mains cherchaient leur chemin sur le corps de l’autre, nous avons nommé nos limites. Certaines pratiques étaient off-limits, mais nous avions encore un immense terrain de jeu où nous amuser jusqu’à tard dans la nuit. Nous avons redéfini ensemble l’acte de faire l’amour, selon nos besoins et nos envies à ce moment.
Alors, qu’est-ce qui compte quand on fait l’amour dans une relation queer ? À vous de construire votre propre définition (qui peut toujours évoluer) ensemble !
Voici un poème inspiré de cette première fois :
Les torrents me ramènent toujours à toi. À notre liberté d’être comme deux adolescentes qui s’émerveillent devant l’immensité nouvelle. Le beau est là, dans ton sourire, sur ton corps, partout où on peut voir l’horizon.
Ton ventre raconte les histoires que tu ne partages pas. La douceur du vent nous rapporte à notre innocence fragile, celle qui nous offre le courage d’être nous, dans la nudité qui nous enveloppe.
– Marie-Pier Deschênes
L’après-bal
C’était la hipster qui faisait de l’impro au secondaire et j’étais la sportive qui jouait au soccer 5 jours par semaine. Je n’avais jamais vu une fille de cette manière. J’avais cette même fascination envers elle qu’Edward avait envers Bella dans Twilight. Après 3 mois à convaincre mes parents que c’était « juste une amie » qui venait quotidiennement à la maison, je leur ai annoncé qu’elle était bel et bien devenue ma première blonde.
À la fin de notre secondaire 5, elle et ses amies étaient responsables de s’occuper de l’après-bal qui était sur invitation seulement. Je la trouvais tellement cool et hot cette journée-là. Elle finissait les derniers préparatifs de l’immense chalet loué qu’entre-temps, elle décida de prendre une pause pour m’offrir de faire un tour des chambres disponibles pour trouver la nôtre. On a regardé la suite, les petites chambres puis les dortoirs. Une par une, pour finir à sauter sur l’un des bunk beds des dortoirs en riant de celleux qui y dormiront saouls dessus dans quelques heures.
On partageait des rires puis des baisers. Tranquillement, l’ambiance de camaraderie se transformera en une intimité charnelle. Elle regarda sa montre, il nous restait 2 heures avant que les autres nous rejoignent. J’ai sauté sur cette occasion pour balader mes mains sur son corps tout en continuant de l’embrasser. Je la découvrais d’une autre façon et cette attirance que je ressentais me semblait si naturelle. Je descendis tranquillement mes mains vers ses cuisses puis vers son entrejambe pour réaliser que mon attirance était tout aussi réciproque. C’était la première fois que je touchais à un sous-vêtement chaud et humide, ça m’excitait tellement même si je gardais une réserve devant elle. Je me sentais fébrile. Un peu comme le 25 décembre lorsque les cadeaux sont sous le sapin et que tu attends le feu vert de tes parents pour les déballer avec toute l’excitation possible du monde à découvrir ce qui se cache sous l’emballage. Sauf que cette fois-ci l’emballage débordait de cyprine et était plus que prêt à être déficelé pour entendre les gémissements qui l’accompagnaient.
La suite fut intuitive et ancrée dans l’amour (tout en gardant en tête que c’était dans un bunk bed d’un chalet d’après-bal). En la serrant dans mes bras, le cœur tout plein de nos derniers ébats, je flottais sur un nuage. Rempli de stupéfaction, j’ancre ce moment partagé en notant que le premier clitoris que j’aurai touché de ma vie aura été le sien et non le mien.
– Anonyme
Je désire aussi essayer mais comment mis prendre?