Lucien a rencontré Manon, 30 ans, diabétique de type 1 (DT1 pour les intimes) qui vit avec le diabète depuis 15 ans. Elle a donc « passé la moitié de sa vie avec son diabète » comme elle dit. Directrice de séjour thérapeutique à destination des ados diabétiques, responsable de communication à l’Aide aux Jeunes Diabétiques, bénévole au sein du Conseil Jeunes Adultes Diabétique de l’AJD, participante de podcast à destination de la même cible… Elle s’implique énormément pour sa communauté et nous a fait l’honneur de nous donner un peu de son temps pour nous sensibiliser à sa réalité.
Elle a eu l’immense patience de tout raconter : ce qu’est le diabète de type 1, comment ça se passe au quotidien, mais aussi les dates, les premières fois avec une nouvelle personne. Tout.
Quand on parle de diabète de type 1, on pense surtout aux injections, aux personnes qui se piquent le doigt et au niveau de sucre (voire à la glycémie, si on connait quelqu’un de concerné). Mais vivre avec un DT1, c’est bien plus que ça, et ça touche même des aspects auxquels on ne pense pas forcément de prime abord. Par exemple : la sexualité.
Le diabète de type 1, c’est quoi ?
Commençons par le début pour s’assurer que tout le monde sache de quoi on parle. Le diabète de type 1, c’est une maladie auto-immune qui met en cause ton pancréas. En gros, ton corps décide d’attaquer les cellules qui produisent l’insuline, l’hormone qui régule le taux de glucose dans ton sang.
Le corps, c’est comme un équilibriste sur un fil de sucre. Pour une personne sans diabète, tout se gère en coulisse : ton corps ajuste le taux de sucre dans le sang et tu ne t’en rends même pas compte. Mais pour une personne avec un diabète de type 1, ça se complique. Le stress, les émotions fortes (comme un premier rendez-vous ou une réflexion intense) peuvent faire grimper la glycémie (le sucre), tandis qu’une bonne session de sport (ou, soyons honnêtes, une relation sexuelle) peut la faire plonger.
En hypoglycémie, ton corps manque de sucre, et ça peut devenir compliqué : tu te sens faible, tu trembles, et ton teint vire au blanc. L’hyperglycémie, c’est l’inverse : ton taux de sucre grimpe en flèche, tu deviens irritable, épuisé·e, et tu as une soif insatiable, comme si tu venais de courir un marathon.
Le DT1, c’est une maladie à vie. Ce qui signifie que tu dois surveiller et gérer tes taux de glycémie en permanence. Ça demande de l’énergie, de l’attention, et ça prend une place dans ton quotidien et dans ton espace mental. Il faut apprendre à vivre avec et à s’adapter.
Et la première étape, c’est souvent d’accepter son diabète.
Le corps médical
Vivre avec le diabète implique souvent (mais pas toujours) d’avoir un dispositif externe comme une pompe à insuline. Ce petit appareil peut parfois rendre certaines activités un peu plus complexes, comme le sport par exemple, mais aussi le sexe.
Ce que Manon nous expliquait, c’est qu’enfant, les personnes diabétiques vivent souvent avec l’impression que leur corps appartient plus aux médecins qu’à elleux-mêmes. Entre les tests, les injections, et les explications techniques sur un pancréas défaillant (avant même de savoir écrire son prénom correctement), s’approprier son corps et accepter le diabète devient un vrai défi. C’est comme si tout, y compris son propre corps, passait d’abord par le filtre médical. Mais surtout, c’est un biais quant à l’appropriation de son corps.
Les défis et la réappropriation de son corps
Pendant l’adolescence, il y a donc nécessairement un processus de réappropriation de son corps qui intervient, plus ou moins facilement selon les personnes. Et ça peut passer par plusieurs choses puisqu’à la question épineuse de la sexualité s’ajoute celle de la gestion du diabète.
On parle souvent de représentations nécessaires pour la découverte de son identité sexuelle ou de genre. Pour le diabète, c’est un peu similaire. Manon nous parlait de Nick Jonas (on le dit pas trop fort, mais c’est une grande fan des Jonas Brothers), de plusieurs athlètes avec des dispositifs visibles aux JO ou encore de la fille de Kate Moss qui défile sur les podiums avec des capteurs apparents sur le bras.
Tout cela permet de faciliter une entrée dans la vie sexuelle un peu plus saine et de s’accepter plus facilement.
Les « pauses-pompe » pendant les relations sexuelles
Quand les discussions avec Manon ont commencé, on parlait surtout de la difficulté de gérer le matériel, les fils, la pompe. Mais finalement, c’est toute une autre dynamique qui s’installe et d’autres paramètres qui entrent en ligne de compte, lorsque l’on est DT1.
À un moment ou un autre, il faut débrancher la pompe. C’est souvent quand ça devient plus chaud, quand des vêtements commencent à dévoiler les corps. Et parfois, ça peut ressembler au temps « de pause » lorsque l’on sort un condom. Ça peut paraître comme un truc qui casse l’ambiance, mais ça fait partie de la « chorégraphie ». Manon évoquait différentes personnes avec qui elle avait échangé, notamment des personnes qui, avec le temps, trouvent des solutions pour que ça passe plus ou moins inaperçu, à la manière d’un dégraphage de soutien-gorge.
Mais il y a aussi une autre perspective, plus technique et médicale. C’est que le sucre, t’en as besoin dans ton corps quand l’activité s’intensifie. Physiquement comme mentalement. Tu as donc besoin de plus d’énergie quand tu fais du sport, car plus de risque d’hypoglycémie, mais aussi lors d’examens, quand tu as peur, ou lors de gros moments de réflexion et même quand des émotions amoureuses prennent le dessus. Et, guess what, t’en as donc besoin quand tu fais du sexe !
La boîte de sucre à côté de la boîte de sextoys !
Que tu sois concerné·e ou non par le diabète, il y a des trucs simples pour rendre ces moments plus faciles. Parce que oui, prendre une partie de la charge mentale, être à l’écoute et présent·e si tu couches avec une personne diabétique, c’est aussi ça être un·e partenaire en or. Par exemple, garder une boîte de sucre à proximité, l’offrir depuis ta bouche pour garder du sexy au moment, c’est aussi une cute idée.
Manon nous parlait encore de témoignages d’ados avec lesquel·le·s elle travaille, qui regorgent d’astuces : toujours manger beaucoup avant une date, avoir du sucre dans le tiroir entre les jouets et les condoms, etc. Petite pépite qui a la palme de la créativité, intégrer le sucre dans les jeux sexuels : le miel qui est très sexy à étaler sur un corps (et à lécher !). C’est pratique et sensuel à la fois !
Des petits détails qui n’en sont pas
Quand on vit avec le diabète, la sexualité peut parfois apporter son lot de surprises inattendues qu’il faut pourtant connaître.
Par exemple, dans les éléments importants à connaître pour les personnes avec un vagin, il y a un risque accru d’infections comme les mycoses, surtout si la glycémie n’est pas bien contrôlée. Du côté des personnes avec un pénis, l’hypoglycémie peut parfois jouer des tours… Si t’es en hypo, c’est comme si ton corps disait : « Pas de sucre, pas d’énergie, pas d’érection ». T’en fais pas, tout ça se gère, mais c’est bon à savoir pour éviter des situations incommodantes.
Il y a aussi le moment où tu tombes en hypoglycémie pendant le sexe. Et là, c’est important de le dire et d’agir en conséquence. Se resucrer, boire, prendre le temps d’aller mieux, se câliner : c’est pas grave de devoir faire une pause pour se sentir mieux et mieux repartir après. Le désir, ça ne part pas comme ça, alors qu’une hypo, ça peut partir hyper vite. Alors, prends le temps d’être bien avant de repartir dans le feu de l’action ! (Si l’envie est encore là, évidemment.)
La communication avant tout
Comme pour toute relation, la clé est la communication. Dans ses ateliers avec des ados qui vivent avec un diabète, Manon évoque toujours le sujet de « Faut-il en parler à tan partenaire ? Même si c’est un one night stand ? Comment en parler ? ». Et en fait, la réponse, c’est souvent « Ça dépend de toi ».
Même si elle pense qu’il vaut mieux en parler avant, pour elle c’est pas obligatoire. Elle nous racontait que des personnes n’en parlaient pas du tout avant et attendaient que l’autre personne pose des questions en voyant leur pompe par exemple. Manon, elle, de par son emploi et sa vie qui tourne beaucoup autour du diabète, c’est comme un accès facile à la discussion.
Pour elle, en parler avant aide à éviter les malentendus et à se sentir à l’aise. Elle insiste sur le fait qu’il est important d’avoir des relations saines et d’arrêter de s’excuser d’être diabétique. Si tu te sens jugé·e ou mal à l’aise, il faut oser dire que tu ne veux pas continuer. Diabétique ou non, la communication c’est la clé.
Finalement, que tu vives avec un diabète ou pas, la sexualité est une question de confort et de communication. N’hésite pas à en parler ouvertement et à ajuster les choses selon tes besoins. Les pauses-pompes, le diabète en lui-même ou les moments de resucrage ne devraient jamais être une source de gêne — on est là pour s’amuser, se faire plaisir et se sentir bien !
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