Fantasmes sexuels et féminisme : le duo infaillible

Ah, les fantasmes sexuels ! Qui n’a pas ces petites pensées fugaces qui se faufilent dans nos têtes comme une anguille entre deux roches ? Que ce soit un scénario épique et chevaleresque, une rencontre improbable, des envies de soumission ou même un moment doux et intime, les fantasmes sont une partie essentielle et saine de notre sexualité. Pourtant, il arrive encore qu’ils soient stigmatisés ou considérés comme tabous de par leur nature. On se pose donc la question : sont-ils une réflexion de nos valeurs ? Et tant qu’à faire : est-ce qu’on peut être ardemment féministe et avoir la culotte mouillée à l’idée de se faire donner la fessée ? Suis-nous dans notre petite réflexion sur le sujet.

Les fantasmes : un univers de liberté

D’abord, revenons aux bases. Qu’est-ce qu’un fantasme ? C’est une pensée produite par l’imagination, sexuelle ou non, pour s’exciter sexuellement seul·e ou avec tan partenaire. En fait, les fantasmes sexuels sont des aspects importants et sont une partie intégrante de la vie de près de 90% des adultes (Joyel, Cossette et Lapierre, 2015). Étant le produit de notre imaginaire, les fantasmes ne se limitent pas à ce qu'on vit au quotidien. En effet, ils peuvent se produire avec des personnes qui nous sont inconnues, dans des endroits non-visités et même dans une époque autre que la nôtre ! Bien qu’ils soient sans limites, il est rapporté qu’ils sont tout de même influencés par les normes sociales ou encore ce qui est interdit ou non. 

Il y a des fantasmes pour tous les goûts. Ils peuvent même varier pour une même personne ! Un soir, tu peux être d’humeur à rêver d’une soirée romantique au clair de lune, tandis que, le lendemain, tu t’imagines arbitre d’un combat de sumos nus. Tu pourrais même fantasmer d’une rencontre impromptue avec un·e inconnu·e et t’en donner à cœur joie derrière un buisson. Sans être un scénario précis et détaillé, d’autres personnes peuvent fantasmer sur des pratiques sexuelles en particulier, comme du sexe à plusieurs, prendre ou donner le contrôle, etc. Au final, les fantasmes changent au gré du temps et leur nature peut varier selon un éventail de facteurs, comme l’humeur ou encore l’état de santé, l’environnement, les interactions sociales de la journée… et nos rêves les plus fous ! 

Dans un article qu’elle a rédigé sur le sujet, la sexologue Anne-Claudel Parr affirme que « le type de fantasmes qu’on entretient peut parfois nous renseigner sur certains éléments de notre personnalité, sur la culture dans laquelle on a grandi et même sur nos allégeances politiques ! Mais à part ça, ils ne veulent pas dire grand-chose ; il faut donc éviter de les suranalyser ou pire, de ressentir de la honte de les avoir ! » Nos fantasmes ne reflètent donc pas nécessairement nos valeurs profondes ; on peut vouloir jouer à l’esclave sexuel·le le soir et manifester pour l’égalité des genres le jour !

Maintenant, quel est le lien avec le féminisme ?

Pour te rafraîchir la mémoire, le féminisme prône l’égalité des genres. Les idées et les mouvements sociaux lui étant propres encouragent la liberté d’expression, de penser et d’agir. Avec sa mission d’autonomiser et de libérer les voix de chacun, il nous encourage à explorer les fantasmes sans honte. Que ce soit des fantasmes d’un ménage à trois ou de faire l’amour sur la plage avec un·e pur·e inconnu·e, le féminisme nous encourage à imaginer tout ce qu’on désire. Une personne fantasmant sur le fait de se faire dominer peut donc être tout autant féministe, puisque l’objectif est de s’affirmer et de laisser libre cours à son imaginaire.

On oserait même dire qu’on peut utiliser les principes du féminisme pour explorer ces désirs !

Des fantasmes pour notre bien-être 

Le féminisme défend le droit de chaque individu à disposer de son corps et de sa vie — ça inclut la vie sexuelle. Le féminisme nous a alors appris qu’on a le droit de parler de et d’explorer nos désirs. Cette ouverture d’esprit est cruciale. En partageant nos fantasmes, on brise les tabous et favorise un espace de discussion où tout le monde se sent en sécurité. La libération des fantasmes peut aussi amener plusieurs bienfaits psychologiques. 

‍Primo, les fantasmes t’offrent un espace où tu peux explorer tes désirs et mieux te connaître. De cette manière, tu peux mieux identifier ce que tu aimes et ce que tu désires. Mieux se connaître renforce la confiance en soi et t’aide à développer une image positive de ta sexualité. 

‍Secundo, tes fantasmes peuvent représenter une pause mentale dans une vie envahie par la performance, le stress et la routine épuisante. Que ce soit seul·e ou accompagné·e, ils peuvent t’aider à relaxer, t’évader et stimuler ton énergie sexuelle. 

‍Tertio, tes fantasmes peuvent être une opportunité pour développer une complicité avec tan partenaire. En effet, le fait de les partager favorise un dialogue sincère et ludique. Tu peux ainsi vivre de nouvelles expériences ou connaître de nouvelles pratiques sexuelles dans le respect et le plaisir. 

La libération des fantasmes

Nos normes sociales sont encore très rigides et conservatrices. Si certains fantasmes ou actes sexuels sont considérés comme normophiliques, ce qui veut dire qu’ils sont socialement acceptés dans une culture donnée, d’autres sont catégorisés comme paraphiliques, c’est-à-dire qu’ils sont étiquetés comme « hors normes » dans cette même culture. 

Si toutes les personnes impliquées dans les activités sexuelles sont all in et consentantes, qu’aucune ne vit un préjudice et que la pratique respecte les limites de la loi, pourquoi ne pas vivre sa sexualité librement de tous les construits sociaux un peu arriérés ? Le féminisme célèbre la diversité et l’inclusivité. Peu importe ton orientation sexuelle, ton identité de genre, tu mérites d’explorer tes désirs sexuels sans jugement. 

D’autre part, soyons honnêtes : qui a dit que les femmes devaient fantasmer d’être dans les bras d’un homme musclé comme Thor et que les hommes devaient rêvasser de ménage à trois ? Les fantasmes, lorsqu’ils respectent les lois et le consentement, ne connaissent pas de règles fixes ni de genres. Les explorer est une belle occasion de déconstruire (enfin !) les stéréotypes de genre. Un homme peut désirer d’avoir des relations sexuelles en portant un g-string et un soutien-gorge, autant qu’une femme peut souhaiter se faire prendre par-derrière. Il est grand temps d’ouvrir le dialogue et de montrer que tout le monde a le droit de désirer ce qu’il veut.

L’importance de la communication

Un autre aspect essentiel des fantasmes, c’est la communication. Le féminisme prône la transparence et le consentement, et cela s’applique évidemment aux désirs sexuels. Il est crucial de discuter de ses fantasmes avec san ou ses partenaires. « Alors, chéri(e), que dirais-tu de tester ce nouveau scénario de pirate ? » La communication ouverte permet de créer une atmosphère de confiance. 

La clé est de se sentir à l’aise et libre d’explorer. C’est aussi vrai pour parler de tes fantasmes que pour établir tes limites. Tan partenaire t’a divulgué son fantasme et tu n’es pas à l’aise ? C’est bien correct ! Que ce soit un refus catégorique ou un refus pour l’instant, tes limites sont valables, peu importe leur nature, et il est tout aussi important de les partager et de les respecter. 

Ose rêver en grand !

En fin de compte, le féminisme encourage une vision positive de la sexualité, où le plaisir, le consentement et la découverte sont valorisés, sans honte ni culpabilité, quelles que soient les préférences ou pratiques (tant qu’elles sont consensuelles), en faisant de lui un allié puissant à l’exploration des fantasmes. Il nous rappelle que nos désirs font partie intégrante de qui nous sommes. Oser partager ces envies et vivre sa sexualité sans crainte est un acte de rébellion contre les normes sociétales. Alors, la prochaine fois que tu te perds dans tes pensées ou que tu te laisses aller à un rêve audacieux, souviens-toi : c’est ton histoire, et tu en es le héros ou l’héroïne ! Le monde est un vaste terrain de jeu, et chacun mérite d’y trouver son plaisir.

Fantasmes atypiques… ou problématiques ? 

Tous les fantasmes de ton monde imaginaire sont respectables et toi seul·e peux y avoir accès. Ceci étant dit, des fantasmes peuvent non seulement être atypiques, mais peuvent aussi illustrer un trouble paraphilique. Pour t’aider à y voir plus clair, voici deux aspects auxquels tu dois demeurer vigilant·e : 

1. Si ton fantasme devient DEF :

• Entraîne une Détresse : si ton fantasme crée de l’anxiété, de la tristesse, de la colère ou un sentiment de désespoir. Tu peux aussi vivre une perte d’estime de soi, ou encore avoir de la difficulté à dormir. Ton ou tes fantasmes peuvent aussi t’amener à t’isoler socialement ou être une motivation à consommer des substances. 

• Envahissant : ton fantasme est nécessaire pour avoir une vie sexuelle. Ton désir et ton excitation sexuelle dépendent de la présence ou non de ton fantasme. Ton fantasme nuit au déroulement de tes activités quotidiennes (sociales, sexuelles ou professionnelles). 

• Fréquent : tu penses au fantasme plusieurs fois par jour. 

2. La deuxième limite concerne les fantasmes qui sont jugés immoraux ou qui sont tout simplement illégaux. Cette catégorie comprend la bestialité, le sadisme, le rape fantasy, les relations sexuelles incestueuses ou intrafamiliales ou tout autre fantasme ne respectant pas les lois. Bien que tu sois la seule personne maître de tes pensées, sois conscient·e que certains fantasmes ne peuvent pas être réalisés parce qu’ils sont punis par la loi et peuvent porter préjudice à toi et aux autres.

Si tu te poses des questions sur ton univers fantasmatique ou que tu te retrouves dans une des deux catégories ci-dessus, n’hésite pas à consulter un·e sexologue près de chez toi. Ces professionnel·le·s sont outillé·e·s pour t’aider !