Tu as envie de resserrer les liens avec tan ou tes partenaires ? Les rôles de domination ou de service top te plaisent dans une scène érotique ? Tu aimes exhiber ton côté malin au jeu, ou encore te prélasser dans les bras et les désirs de tes amant·e·s ? Tu admires la poésie des corps pris dans et par des cordes et voudrais t’y mettre ? Viens donc faire un tour avec nous au petit paradis des liens sexy et sécuritaires pour prendre plaisir au « B » du BDSM.

Pourquoi on s’y (a)donne

Se faire restreindre, c’est s’offrir à l’autre ; à sa vue, à ses mains, à son corps, à sa volonté. Cette vulnérabilité peut faire peur comme elle peut être délicieuse ! Et forcément, il y a divers degrés et tout ça n’est pas un grand paquet à prendre ou à laisser. On peut d’ailleurs y rechercher la douleur en tant que telle et/ou les dynamiques de pouvoir et d’énergie qui s’y jouent. Il y a des gens pour qui douleur rime avec plaisir, tandis que d’autres n’en sont pas particulièrement friands. La douleur peut être véhicule d’autre chose, ou bien elle peut être évitée entièrement. Idem pour les sentiments de resserrement, de restreinte et d’espace — par exemple se faire enserrer la poitrine de manière à contrôler la respiration.

Une distinction en anglais aide aussi à situer son intérêt : to be tied up, c’est-à-dire attaché·e à soi-même vs to be tied down, soit attaché·e à quelque chose. On peut donc avoir nos membres liés les uns aux autres, par exemple les poignets attachés, et/ou être restreint·e par notre proximité à un objet, un meuble, une autre personne, même.

Qu’est-ce qui te fait chavirer là-dedans ? À quoi ressemblent tes fantasmes, ou que ressens-tu lorsque tu t’imagines intentionnellement dans des situations qui ne te sont pas coutumières ?

Règles de base à respecter

Comme dans le kink en général, on apprend correctement avant de se lancer dans les grandes aventures ! Tu ne sautes pas d’un avion avant d’avoir appris à utiliser ton parachute, et même que tu ne sautes pas seul·e avant d’avoir acquis énormément d’expérience. Tu fais confiance aux expert·e·s là où le risque est évident, alors il faudrait bien se renseigner sur les risques avant de se jeter dans l’intensité de l’activité que tu contemples. On te propose aussi de jeter un coup d’œil aux 10 règles du BDSM à connaître avant de donner le premier coup de fouet qui s’appliquent tout aussi bien au bondage. Tiens, en voici quelques-unes qui méritent encore et toujours d’être répétées :

  • Ne jamais laisser quelqu’un·e attaché·e sans surveillance, au cas où les choses tourneraient mal ; physiquement ou émotionnellement.
  • Ne pas attacher une personne à un support qui est instable ou non sécuritaire, par exemple qui n’est pas fait pour soutenir un tel poids. Informe-toi à propos de l’équipement structurel nécessaire avant de te le procurer ou de tenter des choses de façon précipitée.
  • Ne pas attacher un corps plus haut qu’on est capable de le soutenir ou de le descendre en toute sécurité dans l’événement d’un détachement précipité. La hauteur des nœuds ou des attaches est aussi à considérer. À cet égard, ne pas non plus positionner un corps beaucoup plus lourd que le sien à un endroit hors d’atteinte.
  • Si une personne est en danger, tant pis pour le bel équipement qui t’a coûté cher ! La vie et la santé des participant·e·s valent infiniment plus, alors n’hésite surtout pas à couper les liens même si ça les ruine.
  • Lorsque c’est possible, pratiquer un nœud ou l’utilisation d’une attache sur soi-même avant de le faire subir à autrui. Voilà d’ailleurs un beau point à faire : ladies, gentleman, theydies and gentlethems les riggers, de grâce, laissez-vous attacher de temps en temps pour mieux vous mettre dans les chaussures (ou petits déshabillés) de vos bottoms ! Difficile autrement de se faire une idée des pressions, des positions et de l’intensité de la chose…

À vos risques et périls

Le bondage comporte des risques indéniables, puisqu’il s’agit de restreindre et d’attacher un être humain. Les risques de blessure physique sont élevés même (surtout) pour les expert·e·s (qui tentent souvent des choses plus complexes et dangereuses). 

Pour le corps

Au-delà des bleus et des égratignures, ces accidents en surface, considère notamment les blessures plus graves liées aux chutes et particulièrement aux nerfs qui affleurent entre les muscles où on a tendance à attacher. 

De la même manière que certaines attaches sont à éviter pour limiter le danger lorsque tu ne sais pas t’y prendre, certains emplacements sur le corps seraient probablement à éviter systématiquement au début, le temps de maîtriser ce qui est sécuritaire. Quelques endroits sont à risque plus élevé que d’autres, et ils peuvent être clairs (par exemple la gorge) tout comme ils peuvent paraître moins évidents (les aisselles, où certains nerfs sont plus exposés). Il est important de ne pas serrer trop les liens à certains endroits pour ne pas couper la circulation, et le degré de cette précaution est quelque chose à apprendre auprès des pros. 

Sache aussi qu’il existe des moyens pour les rope bottoms de vérifier si les nerfs ne sont pas comprimés de manière périlleuse, soit des gestes à faire avec les mains, et d’autres que les rope tops doivent également performer au fur et à mesure qu’iels attachent leur/s partenaire/s. 

Même avec tout ça pourtant, nombreuxes sont celleux dans les communautés kink ou de corde qui ont perdu définitivement des sensations dans certains membres à cause d’accidents de parcours ou de scènes particulièrement intenses. À toi de te renseigner sur les risques et de pratiquer l’activité en question en toute connaissance de cause.

Pour l’esprit

Les blessures psychiques et émotionnelles sont aussi un gros risque à garder en tête alors que tu approches une scène. N’oublie pas que la vulnérabilité dans laquelle la personne attachée se trouvera est immense et que certaines personnes réagissent intensément à celle-ci. Ce n’est pas tout le monde qui veut se retrouver en situation de domination. Cela prend énormément de confiance, et le trauma fait parfois en sorte que c’est impossible — et que ce n’est pas là un endroit à explorer ou sur lequel insister. Des fois, ce n’est simplement pas quelque chose de particulièrement agréable non plus !

S’y préparer et se soigner par la parole

La communication passe avant tout : les négociations sont un must. Pour pouvoir donner son consentement libre et éclairé, il faut savoir dans quoi on s’embarque ensemble. Avant de s’adonner à une activité nouvelle, en particulier dans un espace intime et/ou érotico-sexuel, il faut bien réfléchir à ce que l’on veut, désire et accepte. Lorsque tu as un peu une idée de départ, discutes-en avec tan ou tes partenaires. Est-ce que ça vous intéresse, vous excite ou vous cause de l’anxiété ? Pouvez-vous mettre le doigt, indépendamment ou ensemble, sur les composantes de l’expérience qui vous mettent mal à l’aise et sur celles qui vous intriguent ? Comment ensuite concocter un petit plan de la séance qui honore les limites de toustes celleux en jeu ?

Pas besoin de tout savoir à l’avance ! Il importe de commencer quelque part (et pas nécessairement de continuer). D’ailleurs, il se peut qu’en proposant fébrilement de te faire écarteler sur la table de cuisine avec les yeux bandés devant un auditoire amical, tu réalises en fait, après un peu de réflexion, de discussion et de temps passé à digérer l’idée, que tu préfères vraiment prendre ça mollo en commençant par avoir les bras attachés à une chaise ou tu te trouves assis·e bien confo, les yeux ouverts et simplement dans l’impossibilité momentanée de renchérir avec tes mains aux gestes de tan partenaire.

Un ajustement constant

N’oublie pas non plus que l’apprentissage se fait graduellement, et que ce plan se doit de respecter les limites des connaissances, de l’expérience et du confort du moment — qui pourront ou non se modifier d’une fois à la prochaine, et pas forcément dans la direction à laquelle on s’attend ! 

Autant lea rigger peut s’améliorer dans ses nœuds à force d’avoir pris des cours, autant un manque de pratique régulière risque de lui enlever de l’assurance qu’il faudra regagner petit à petit pour ne pas attacher au-dessus de ses moyens du moment. 

Quant au rope bottom, ce n’est pas parce qu’iel a déjà consenti par le passé à une scène risquée ou intense que ça sera pareil la prochaine fois. Pense aussi que les corps manifestent leurs propres limites en fonction des niveaux d’énergie ou de fatigue, et que des blessures (reliées ou non au bondage) doivent être sérieusement prises en compte lors de la discussion pré-séance.

Retour sur la séance

La pratique parente de la négociation, c’est l’aftercare. N’oublie pas qu’après être entré·e dans un espace aussi tender — au sens de tendre comme de possiblement douloureux — il faut s’assurer de fermer en douceur et en présence cet épisode de grandes vulnérabilité et intensité. Ensemble, faites un debrief sur ce qui s’est déroulé et passez en revue ce qui vous a plu et ce qui vous a déplu. Lancez quelques idées pour la prochaine séance, si tant est qu’il y en ait une. Et surtout, exprimez toute votre gratitude pour l’ouverture, la confiance et le respect dont vous vous faites preuve !

Le kit débutant

Le bondage, ça peut se faire grâce à une variété d’accessoires. Commence par ce que tu as à la maison ! Une cravate, un foulard, une ceinture… Familiarise-toi avec des objets du quotidien que tu peux transformer en jouets et aides à l’exploration d’énergie joueuse. Pour en revenir à la distinction tied up vs tied down, n’oublie pas que tu peux intégrer des objets à ton expérience : quelles sensations et émotions seraient suscitées si tu attachais quelque chose comme un vibrateur à ton corps, ou un coussin dont le tissu est rugueux ou stimulant à tes sens ?

Côté sécurité, garde toujours une paire de ciseaux (comme ceux que tu trouves dans les trousses de premiers soins, avec le bout rond qui évite de couper la peau) ou un cutter spécial tout près.

image d'une paire de ciseaux d'ambulanciers

Créativité

Si ça te dit, va ensuite faire un tour dans une boutique érotique ou un sex shop. (On t’invite d’ailleurs à aller voir notre kit Emprise, comprenant menottes, corde, bâillon et autres items excitants. 😉) Là, tu trouveras quelques favoris avec lesquels tâter le terrain. La variété des menottes seules saura te faire réfléchir à ce qui t’intéresse et te titille : aimes-tu la douceur et le play de jolies menottes à fourrure rose ? Peut-être la sensation du métal contre tes poignets, ou bien celle du cuir ?

photo d'un ensemble d'introduction au bdsm comprenant des menottes, un fouet, un collier, une laisse, une corde, un bâillon et un bandeau pour les yeux.

Tu rencontreras aussi des accessoires de bondage plus élaborés, comme des contraptions à plusieurs parties qui connectent par exemple les poignets aux chevilles, les bras derrière le corps ou les poignets au cou. L’entrée dans la situation de restreinte est souvent simple et le focus est plutôt sur le côté érotique de la position et de ce qu’on peut (s’)y faire que sur la plaisante complexité du processus pour s’y rendre.

Conception

Pour développer ton ingéniosité en manipulation de matériel de bondage, pense d’abord au bondage tape. Il s’agit d’une sorte de ruban adhésif qui se colle sur lui-même tout en laissant la peau indemne. Outil parfait pour éveiller curiosité et créativité ! Si tu cherches à te concentrer sur des attaches plus élaborées pour exercer tes talents de rigger ou passer au côté artistique de la chose, va faire un tour dans la section des cordes. Les boutiques sexy tendent à vendre de la corde en nylon qui est douce et colorée, mais rarement adéquate au shibari sérieux. Ça n’empêche qu’elle peut très bien servir à des scènes dans la chambre à coucher (ou ailleurs) !

L’art du shibari

Pour t’adonner au shibari ou kinbaku, cet art du bondage érotique japonais qui impressionne par ses motifs élaborés et ses suspensions, il faudra cependant acquérir du matériel spécialisé. La corde de jute ou de chanvre est de mise, et peut se faire importer du Japon pour les friand·e·s de l’original. 

Éventuellement, si ton niveau d’expertise le permet, tu pourras aussi vouloir faire l’acquisition d’accessoires avancés qui permettent des suspensions sécuritaires. Pour minimiser les risques, on t’encourage à te renseigner et à t’éduquer adéquatement avant tout achat, et de faire usage du matériel approprié sous supervision dans les espaces dédiés à ça, comme les pratiques Open Space à Tension Mtl et les soirées au donjon.

Coups de cœur

As-tu déjà fait un tour au Salon de l’amour et de la séduction annuel, à la Nuit des Cordes durant la Nuit Blanche, à un party kink comme ceux du Cirque de Boudoir à Montréal ou bien à un donjon ? Voilà de super façons de t’ouvrir l’esprit à de nouvelles manières d’interagir avec tan ou tes partenaire/s. Tu y rencontreras aussi de bonnes personnes-ressources et trouveras certainement des idées d’activités de couple ou de groupe !

Où se cachent justement les expert·e·s ?

Attention, il faut être capable d’identifier ces expert·e·s avant de leur faire confiance. Quelle est leur expérience ? Depuis combien de temps font-iels partie de la scène kink ? Quelle est leur position éthique sur l’enseignement, le consentement, la sécurité, etc. ?

Tu peux trouver de bons livres sur la chose, mais sache que plus tu te rapproches de l’enseignement en personne, mieux ce sera. Il existe des tutoriels en ligne avec photos et vidéos à l’appui, par exemple Rope 365. Faire un tour à une école de shibari/kinbaku ou à un donjon où tu bénéficieras de conseils personnalisés et de cours donnés par des gens qui ont vraiment de l’expérience, c’est l’idéal ! On apprend toustes différemment, mais le temps et la patience permettent que l’on s’exerce en toute sécurité auprès des pros avant d’introduire des pratiques risquées dans un espace intime et clos.

On te suggère cette formidable compilation de Rope 365 pour magasiner ce qui te conviendra le mieux en matière d’apprentissage. Si tu habites à Montréal, laisse-toi séduire par une Soirée Shibari à Tension, où tu pourras te familiariser avec l’espace et l’équipement tout en rencontrant les professeureuses et les passionné·e·s fort aimables qui y travaillent.

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À propos de Elyx Desloover

Rédacteur·rice pigiste | Pronoms: iel/ellui | Joyeusement gamin·e, j’aime provoquer les gens à jouer. Avec les mots comme les idées, les corps, les identités. Je trouble à dessein les sols sur lesquels on se promène sans y penser. J’interroge et fais réfléchir celleux qui m’entourent pour déconstruire les concepts réducteurs de nos belles et fluides multiplicités. Suite à des études de bac et de cycles supérieurs en philosophie et en littératures, je me consacre à un doctorat en études culturelles axé sur des enjeux trans, féministes et abolitionnistes, la justice transformatrice par le care et les politiques du plaisir. Je vise à soigner ce que je peux grâce aux remèdes naturels, à la cuisine remplie d’amour et de plantes, puis au yoga dont je suis professeureuse. Mon temps libre se trame aussi de rituels intentionnels valorisant la connexion à soi comme à autrui et au monde – communication transparente, tarot, pendule, pleine présence. Que peut-on donc créer ensembles à partir des failles de systèmes morcelés, le poème à la bouche et le sourire dans les yeux?

Une réflexion sur “Petit guide bondage de réflexion et d’action

  1. camille dit :

    Cet article offre une introduction approfondie et bien pensée au monde du BDSM et du bondage. J’apprécie la manière dont il met en avant la sécurité, le consentement et l’importance de l’éducation continue. Les suggestions pour commencer à explorer avec des objets quotidiens sont particulièrement utiles pour les novices. J’admire également le respect des limites et des désirs individuels, en rappelant qu’ils peuvent évoluer avec le temps. Un rappel clé : malgré les dynamiques de pouvoir en jeu, le BDSM doit toujours être basé sur le respect, la confiance et le consentement mutuels.

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