L’univers du BDSM semble en effrayer plus d’un·e et je comprends parfaitement ; c’est effrayant, l’inconnu. On a jasé avec des adeptes de la pratique, question de décortiquer le tout et d’en apprendre un peu plus sur ce que ce milieu implique vraiment.

Jeanne (graphiste et fan d’escalade, grande passionnée de bière de micro et, surtout, mom de 3 chats) et Alex (capitaine de bateau, cycliste endurci et grand fan de manga. Sa passion : Les cartes Magic !) ont accepté de discuter de leurs expériences avec moi. De m’aider à repousser l’idée stigmate d’une sexualité violente et de laisser place à ce que c’est réellement : une expérience consensuelle et respectueuse.

À noter que toutes les expériences sont valides et qu’il est possible que ça ne te corresponde pas, que tu n’aies pas besoin d’essayer pour le savoir. Si tu as eu une mauvaise expérience, j’en suis sincèrement désolée.

L’univers du BDSM semble en effrayer plus d’un·e et je comprends parfaitement ; c’est effrayant, l’inconnu. On a jasé avec des adeptes de la pratique, question de décortiquer le tout et d’en apprendre un peu plus sur ce que ce milieu implique vraiment.

« Depuis combien de temps êtes-vous dans le milieu et à quoi ont ressemblé vos premières expériences ? »

Alex

Je dirais que de mon côté, ça s’est fait assez naturellement. Il y a environ 3 ans, c’est une amie qui m’y a initié. Elle avait l’habitude d’aller dans des donjons et m’a expliqué que c’était un endroit ultra safe où l’on peut apprivoiser cette pratique et établir nos limites. J’ai donc décidé d’essayer et voilà. J’ai adhéré.

Jeanne

Pour moi ça a été de façon plus graduelle et je reste dans le très « soft ». Vous comprendrez qu’on n’a pas besoin d’être dans le rough pour participer à la pratique BDSM. J’ai commencé il y a 1 an.

Il y a beaucoup de relations possibles dans cette communauté. Moi, c’est l’aspect domination/soumission que je trouve intéressant. Il est aussi très important de savoir que dans le BDSM, il n’y a que peu de relations sexuelles. Ce n’est pas le but ultime. C’est plus une histoire de limite, de plaisir et de pouvoir.

Donjon : le donjon est un lieu où les soirées BDSM ont lieu. C’est l’endroit où l’on peut se permettre d’être soi-même sans préjugés et où l’on devient qui on veut le temps d’une soirée. C’est un endroit bienveillant et sécuritaire. C’est une multitude de personnes issues de tous les milieux. C’est une communauté passionnée et respectueuse dans un décor mystérieux. Le cuir, le latex et plusieurs instruments de (imaginez ici un mot qui signifie plaisir et torture à la fois) prennent la place. Il n’est pas nécessaire de pratiquer pour se présenter dans un donjon. Tes limites et ton rythme sont vus et entendus.

« Est-ce que vous vous êtes senti·e·s en sécurité dès le début et  qu’est-ce qui a contribué à ce sentiment ? »

Alex

D’emblée, j’ai envie de te dire que l’utilisation de codes m’a fait sentir « safe » dès le début. 

Bien entendu, on se met dans une position extrêmement vulnérable pis ben, la vulnérabilité ça fait peur. Mais surpasser ça, c’est excitant. Il faut savoir que pour aller dans un donjon, nous devons remplir une sorte de formulaire. Préciser si nous sommes débutant·e·s, quels genres de pratiques nous intéressent, parler de nos « kinks », établir nos limites. Ça aide beaucoup à se sentir en sécurité, je trouve. On est préparé et vraiment pas laissé à nous-mêmes.

Kink : à ne pas confondre avec « fetish ». Il devient celui-ci lorsqu’il devient la source première du plaisir sexuel.

Quelques pratiques retrouvées dans les donjons : 

  • Domination/Soumission
  • Maître·sse·s
  • Humiliations — De par les tenues ou les insultes
  • Jeux de rôles — Médecin, valets, préposé·e aux ménages, etc.
  • Puppy play
  • Chasteté
  • Privation d’orgasme
  • Lavement érotique
  • Bondage
  • et tellement plus encore !

« Ce n’est pas la première fois qu’on me parle de codes afin d’évaluer la douleur et de verbaliser nos limites. Peux-tu me donner un exemple, me parler de tes codes à toi ? »

Alex

Oui, absolument. On est là pour déstigmatiser !

Les plus populaires sont sans doute les codes de couleurs ou bien les « safe words ».

Pour ma part, je dirais que je préfère les codes de couleurs. Exemple : le vert, orange et rouge. Le vert pour signifier que je peux en prendre davantage, l’orange en « slow down » et le rouge en mode limite.

Jeanne

Pour ma part, je n’ai jamais vraiment utilisé de codes. 

J’ai un·e soumis·e depuis un moment déjà. Cette personne-là me vénère et m’offre des cadeaux en échange de temps passé avec iel.

Ça peut sembler être une relation où je suis la seule à tirer profit, mais non, au contraire. Cette personne-là tripe à faire ça. Nous sommes toustes différent·e·s et je pense que c’est important de ne jamais porter de jugement sur ce qui « turn on » le monde ou ce qui les fait sentir bien. 

Je ne suis jamais allée dans un donjon, mais il y en a un qui m’intéresse beaucoup. Un·e ami·e m’a parlé d’un des plus gros — sinon le plus gros — donjons au Canada. C’est une femme qui le possède et après avoir survolé son site Internet, j’étais vendue ! (Je te laisse sa bio qui est, selon moi, très importante à lire. La femme que je suis s’est immédiatement sentie interpellée et en sécurité.) C’est à Vancouver et je vous conseille vraiment d’aller faire le tour du site si vous cherchez un donjon à visiter.

« Qu’est-ce qui vous attire le plus dans la pratique BDSM ? »

Jeanne

Si je parle pour moi, je dirais que c’est très empowering pour la femme que je suis. Ça m’apporte un sentiment de contrôle que je trouve particulièrement satisfaisant.

Alex

Moi, je dirais que je le fais par plaisir. Pour ce que je ressens quand je pousse mes limites. Pour tout ce que je fais vivre à mon corps. Ça m’enrichit beaucoup en tant que personne et j’apprends beaucoup à me connaître. Moi, ce que j’aime c’est surtout la flagellation et le bondage. Je suis la personne soumise.

« On a beaucoup parlé des donjons, mais est-ce que vous avez pratiqué à l’extérieur de cet emplacement ? Est-ce que vous vous y êtes fait des ami·e·s ? »

Alex

Il m’arrive souvent de pratiquer à l’extérieur des donjons. Avec des gens que je connais, on a commencé à s’acheter un peu de matériel et on se fait des soirées entre nous. Par contre, quand tu commences je recommande vraiment les donjons pour ça. Pour prendre le temps de te familiariser avec les différentes pratiques, avec tes propres limites. Tous les donjons dans lesquels je suis allé ont — Consentement et respect — écrit en grosses lettres lumineuses sur le site internet. Tu ne niaises pas avec ça. Si ton consentement n’est pas respecté, ce n’est pas du BDSM, c’est une agression.

Une fois que tu as bien compris ça, que tu es familier à tes désirs et tes limites ; explore. 

Moi je me suis fait 2 bon·ne·s ami·e·s dans un donjon et c’est entre autres avec iels que je pratique à l’extérieur. On aimait pas mal les mêmes choses. Ça a cliqué.

Une communauté bienveillante… 

Alex et Jeanne ont accepté de répondre de façon un peu plus intime, mais nombreux·ses sont celleux qui m’ont donné leurs opinions au sujet de cet article. 

Ce qui revenait beaucoup est le fait que plusieurs ont vécu leurs relations les plus respectueuses à travers le BDSM.

Emma

C’est fou comment on s’imagine que c’est « trash », violent et presque même dangereux. Du moins, c’est ce que je me suis fait dire par beaucoup de gens qui n’y connaissaient pas grand-chose, quand j’ai parlé de mon envie d’en apprendre davantage.

Au contraire, c’était de loin plus respectueux que pas mal tous les « hook up » que j’ai eus.

Mes limites n’ont jamais été dépassées et mes codes ont toujours été respectés.

C’est relatif à chacun·e évidemment, comme toute autre expérience. La première fois que j’ai mis les pieds dans un donjon… Je ne savais pas à quoi m’attendre. Je me suis très rapidement sentie à l’aise d’être là.

Si je pouvais décrire l’énergie d’un donjon en un mot… Je pense que ça serait « Bienveillance ».

… Où l’on prend soin les un·e·s des autres

D’ailleurs, si les échanges de pouvoir dans les dynamiques BDSM peuvent sembler intenses, il faut cependant se rappeler qu’au fond, la personne dominante prend la responsabilité de prendre soin de la personne soumise. De l’aider à réaliser ses désirs de manière sécuritaire. De s’épanouir dans ses envies. Toute une job !

J’espère que ces témoignages t’ont autant donné envie que moi d’en savoir plus (et même d’aller visiter un donjon). Celui de mistressdamazonia vient de tomber sur la « checklist ». Mais sinon, tu peux aussi visiter le Opalace ou Le purgatoire, deux donjons situés à Montréal.

Si cette lecture a piqué ta curiosité suffisamment et que tu en veux plus, je te conseille le livre BDSM : Les règles du jeu — Jessica Caruso. C’est complet, c’est bien écrit et c’est un des seuls livres parlant de BDSM en français.

Bonne lecture, bonnes expériences et n’oublie pas, tes limites sont importantes et se doivent d’être respectées en tout temps — et pas juste durant les jeux BDSM.

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À propos de Joannie Guimond

Rédactrice pigiste | Pronoms: elle/la | Grande amoureuse de vin rouge, de marguerite et de jasette. C’est tout en douceur que j’aborde mon sujet préféré au monde : la sexualité positive. J’ai passé d’un pré universitaire en littérature à barista, à barmaid, à coordonnatrice, tout en accueillant la femme que je devenais et en validant celle que je voulais devenir. J’espère réussir à toustes vous faire sentir compris.es et briser les tabous entourant la sexualité et le féminisme de façon générale. Mes ami.es disent de moi que je trouve du beau dans à peu près tout le monde et que c’est doux. J’espère que cet aspect de ma personnalité ressortira de mes articles et que chaque ligne résonnera comme un p’tit clin d’œil plein de compréhension à ce que tu vis.

Une réflexion sur “Quelque part entre l’érotisme et l’intensité : le BDSM

  1. S. dit :

    Lecture super intéressante

  2. Ève dit :

    Super intéressant, merci pour les définitions. Je me rends compte que j’en connais pas grand-chose sur le sujet !

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