On estime maintenant que les enfants sont exposé·e·s pour la première fois à du contenu pornographique vers l’âge d’environ 10-12 ans*, que ce soit à travers les pop-up, l’influence des pairs ou simplement par curiosité. 

*Sources : institut OpinionWay, 2020 ; Kraus & Rosenberg, 2014 ; Rothman, 2021

Ce n’est pas surprenant, car les enfants ont souvent de nombreuses questions au sujet de la sexualité. Iels veulent comprendre comment fonctionne leur corps et si iels sont « normaux·les ». Lorsqu’il n’y a pas d’adultes pour répondre à leurs questions de façon positive et inclusive, ou qu’il n’y a aucune ressource disponible qui peut adresser leurs questions de façon adaptée, iels ont tendance à se tourner vers les ami·e·s, mais surtout vers internet.

De plus, la porno gratuite en ligne est extrêmement accessible, quel que soit l’âge de l’utilisateur·rice. Il n’y a pas de barrières en place, car la majorité de ces sites gratuits tirent leurs revenus des publicités, qui dépendent du nombre de clics et de vues.

Ce n’est donc pas une question de savoir si l’enfant risque de tomber sur de la pornographie en ligne, mais quand. En parlant ouvertement de la pornographie avant qu’iels n’y soient exposé·e·s, on peut les aider à comprendre ce qu’iels voient et à développer une vision positive de la sexualité.

Avant de parler de pornographie

Avant d’aborder la question de la pornographie, il est essentiel de mettre les bases d’une éducation à la sexualité ouverte et sans jugement.

En parlant ouvertement et honnêtement de sexualité avec les enfants, on s’assure de se positionner comme un·e adulte de confiance pour répondre à leurs questions par rapport à la sexualité avant que l’internet et les ami·e·s ne s’en chargent.

L’éducation aux médias

L’éducation aux médias joue également un rôle important. Les enfants sont exposé·e·s à une quantité importante de messages sur les relations, les corps et la sexualité à travers les séries, les médias sociaux, les jeux vidéo ou les publicités.

On peut donc facilement mettre en place une éducation aux médias dès le plus jeune âge en posant des questions à l’enfant sur les messages véhiculés dans les vidéos ou les images qu’iel regarde.

Par exemple, si on regarde une comédie romantique en famille, on peut demander à l’enfant : « Tiens, il a été l’embrasser, comme ça, fougueusement ; mais comment savait-il qu’elle avait envie de l’embrasser ; est-ce que tu penses que c’est comme ça que ça se passe dans la vraie vie ? »

Cela permet de lancer une conversation sur le consentement, tout en développant l’esprit critique des enfants par rapport à tous les médias qu’iels consomment.

Commencer les conversations sur la pornographie

C’est important de commencer à parler de porno dès que l’enfant a accès à un écran sans supervision, que ce soit une tablette, un jeu vidéo (connecté à internet) ou un téléphone, et ce, à la maison ou chez les ami·e·s.

On peut simplement aborder le sujet en demandant à l’enfant si iel est déjà tombé sur quelque chose — sur internet ou sur les écrans — qui l’a rendu·e mal à l’aise ou à quoi iel ne s’attendait pas.

Ensuite, on peut lui demander si iel a déjà entendu parler de la pornographie et si iel sait ce que c’est. Voici un exemple d’une explication simple et courte :

« Ce sont des vidéos ou des images dans lesquelles on voit des adultes nu·e·s se toucher les parties génitales entre elleux et faire des choses sexuelles. C’est un média qui est fait pour les adultes et pas pour les enfants. »

On rassure

Il est important de rassurer l’enfant en lui disant qu’il n’y aura aucune conséquence négative si iel nous partage qu’iel a déjà vu ces images ; iel ne se fera pas chicaner et ne perdra pas le privilège d’utiliser les écrans. Les enfants comprennent rapidement qu’iels ont vu quelque chose qu’iels n’étaient pas censé·e·s voir et ont généralement peur de perdre leur accès aux écrans si iels rapportent ce qu’iels ont vu.

On normalise

Beaucoup d’enfants tombent sur de la porno par curiosité ou parce qu’iels ont posé leurs questions en lien avec le corps et la sexualité à Google. On peut commencer par normaliser la curiosité sur les différents types de corps. Ensuite, on rappelle à l’enfant que si iel a des questions, iel peut venir nous trouver et qu’on peut aller chercher ensemble des ressources pour y répondre.

C’est une autre occasion d’approfondir l’éducation aux médias et à la recherche sur internet. On enseigne à l’enfant que tout ce qu’on trouve sur internet n’est pas vrai, mais surtout que tout n’est pas adapté pour les enfants ou les jeunes.

On protège

Au-delà de la curiosité, les jeunes sont exposé·e·s à la pornographie par l’entremise de leurs pairs ou par des inconnu·e·s. Ça peut être un·e ami·e qui partage un lien vers du contenu pornographique ou un·e inconnu·e qui envoie une photo, une vidéo ou des messages à caractère sexuel via les réseaux sociaux ou les jeux vidéo.

On s’accorde avec l’enfant que « si jamais tu reçois un message d’une personne que tu ne connais pas — même si c’est un·e autre enfant — il faut que tu viennes me le dire. Parfois, certaines personnes font semblant d’être un·e enfant. Si tu me le dis, on peut vérifier ensemble ».

On supervise

On va mettre en place des contrôles parentaux sur les écrans accessibles à l’enfant, et lui expliquer comment ceux-ci seront utilisés. On établit les règles ensemble et on se met d’accord. Cependant, avant 10 ans, on essaie de limiter le temps d’écran non supervisé, direct ou indirect (on est dans la pièce avec le coin de l’œil sur l’écran), dans la mesure du possible.

Parler de la pornographie avec les ados

Bien entendu, à partir de l’adolescence, les jeunes sont attiré·e·s par la pornographie pour répondre à leurs pulsions sexuelles émergentes, que ce soit par l’influence des ami·e·s ou par curiosité concernant leur corps ou leur orientation sexuelle.

Quels que soient nos sentiments personnels par rapport à la pornographie, il est essentiel d’accueillir ces conversations de façon ouverte et bienveillante pour encourager san jeune à garder un œil critique envers le type de média qu’iel consomme.

Les adolescent·e·s sont souvent mal à l’aise avec les « questions directes » au sujet de la sexualité ou leur rapport à la pornographique, ce qui est bien normal. On peut amorcer une conversation en faisant appel à elleux en tant « qu’expert·e·s de leur génération ». Par exemple :

« Hey, je lisais cet article qui disait que la première exposition à la porno était vers 10 ans. Ça me semble fou, penses-tu que c’est vrai ?! »

C’est une façon assez simple de lancer la conversation. Ensuite, on encourage lea jeune à réfléchir aux messages que la pornographie transmet sur le sexe, le corps, le consentement, les femmes, les stéréotypes, etc.

Proposons aux jeunes de réfléchir au type de média qu’iels soutiennent lorsqu’iels cliquent sur une vidéo ou une image, que ce soit de la pornographie ou non, et de comprendre que la majorité des médias gratuits fonctionnent grâce au revenu publicitaire et donc par les clics et les vues.

On peut offrir un espace sécuritaire pour poser des questions à nos enfants et ados en lançant les discussions autour de la sexualité et des médias. À travers une éducation à la sexualité positive et en les sensibilisant aux messages des médias, on peut les aider à comprendre ce qu’iels voient, à développer un regard critique et à naviguer en ligne en toute confiance.

Pour en apprendre plus

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À propos de Tessy Vanderhaeghe

Rédactrice pigiste | Pronoms : elle/la | Mordue d’escalade, j’ai déménagé de ma Belgique natale pour m’installer à Squamish en Colombie-Britannique. Quand je ne suis pas accrochée aux murs, on me trouvera à brandir des pénis et vulves en peluche dans les salles de classe avec humour et bienveillance. Certifiée en tant qu’éducatrice en santé sexuelle, je crois en une éducation à la sexualité qui commence dès la petite enfance, et je suis là pour accompagner les éducateur·rices, les parents et les familles à lancer ces conversations sans tabou !

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